Évangile du 23 janvier

Lectio Divina du dimanche 23 janvier 2022 : 3e ordinaire

 
Evangile de Jésus Christ selon st Luc (Lc 1, 1-4 ; 4, 14-21)

01 Beaucoup ont entrepris de composer un récit des événements qui se sont accomplis parmi nous,
02 d’après ce que nous ont transmis ceux qui, dès le commencement, furent témoins oculaires et serviteurs de la Parole.
03 C’est pourquoi j’ai décidé, moi aussi, après avoir recueilli avec précision des informations concernant tout ce qui s’est passé depuis le début, d’écrire pour toi, excellent Théophile, un exposé suivi,
04 afin que tu te rendes bien compte de la solidité des enseignements que tu as entendus.
En ce temps-là, 14 Lorsque Jésus, dans la puissance de l’Esprit, revint en Galilée, sa renommée se répandit dans toute la région.
15 Il enseignait dans les synagogues, et tout le monde faisait son éloge.
16 Il vint à Nazareth, où il avait été élevé. Selon son habitude, il entra dans la synagogue le jour du sabbat, et il se leva pour faire la lecture.
17 On lui remit le livre du prophète Isaïe. Il ouvrit le livre et trouva le passage où il est écrit :
18 L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs leur libération, et aux aveugles qu’ils retrouveront la vue, remettre en liberté les opprimés,
19 annoncer une année favorable accordée par le Seigneur.
20 Jésus referma le livre, le rendit au servant et s’assit. Tous, dans la synagogue, avaient les yeux fixés sur lui.
21 Alors il se mit à leur dire : « Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Écriture que vous venez d’entendre. »

Lecture ligne à ligne

01 Beaucoup ont entrepris de composer un récit des événements qui se sont accomplis parmi nous,

L’Evangéliste nous présente ainsi le travail qu’il va proposer : un récit. Il ne s’agit ni d’une méditation, ni d’une histoire inventée. Il ne s’agit pas de souvenirs ou d’une collection de paroles. Il s’agit d’un récit. Il y a donc une logique à l’enchainement des faits et des gestes qui racontent une histoire. Mais celle-ci n’est pas une invention ou une imagination : ce sont des événements qui se sont accomplis.
Remarquons aussi que l’auteur parle de composer. Cela signifie qu’il y a un travail rédactionnel important. Il ne s’agit pas seulement de mettre par écrit une tradition orale préexistante, mais de recueillir toutes ses traditions puis de les mettre en forme, non pour inventer mais pour articuler ces vérités dans une cohérence chronologique et catéchétique. Autrement dit, tout n’est peut-être pas dans l’ordre où cela s’est produit, et certains rapprochements sont peut-être davantage dus à l’intention de l’auteur, qui relie tous ses événements avec sa foi et son expérience d’apôtre de la Parole. En tout cas, il n’invente rien : ce sont des événements qui se sont produits.

Et nous ? Comment lisons-nous l’Evangile ? Comme une histoire, une fable ou bien comme le fondement de notre foi et la Parole de Dieu inspirant la plume d’un auteur humain pour que nous soit transmis à la fois le don de Dieu et les faits et gestes de celui qui est notre Sauveur et notre Dieu ?

02 d’après ce que nous ont transmis ceux qui, dès le commencement, furent témoins oculaires et serviteurs de la Parole.

Il y a une autorité sur ce récit car celui qui écrit se met dans les témoins : « parmi nous » ou en tout cas, comme leur bénéficiaire direct « ce que nous ont transmis ». Est-ce à dire qu’il a été témoin de tous ces événements ? Rien n’est certain. Ce que nous avons, c’est que Luc a été un compagnon de Paul. Certains le pensent converti à Antioche lors du long séjour que Paul a effectué avec Barnabé. D’autres voient en lui un grec craignant Dieu et converti dès la première heure ; d’autres enfin, le voit parmi les 72 autres disciples que Jésus : « deux par deux, en avant de lui, en toute ville et localité où lui-même allait se rendre. » (Lc 10, 1)
Quoi qu’il en soit, Saint Luc est suffisamment proche des dits-témoins, les apôtres et quelques autres hommes, pour s’estimer faisant parti du groupe.
Rappelons-nous ce que Saint Pierre propose au début des actes des apôtres pour le remplacement du traitre Judas :
21 Or, il y a des hommes qui nous ont accompagnés durant tout le temps où le Seigneur Jésus a vécu parmi nous,
22 depuis le commencement, lors du baptême donné par Jean, jusqu’au jour où il fut enlevé d’auprès de nous. Il faut donc que l’un d’entre eux devienne, avec nous, témoin de sa résurrection. » (Ac 1, 21-22)
Il y a donc bien à côté des 12, devenus 11 par la traitrise de Judas, d’autres hommes connus de tous qui sont disciples depuis le baptême, même s’ils n’ont pas été choisis par Jésus dans le groupe des apôtres. L’un d’entre eux va maintenant rejoindre le groupe, qui reviendra au chiffre symbolique de 12, ce sera saint Mathias. Mais il ne remplace pas Judas ; il complète un nouveau groupe qui est composé des onze apôtres fidèles plus lui, mais qui ont une nouvelle mission : être témoins de la Résurrection.
Notons enfin qu’avec ce groupe, il y a encore très certainement les femmes qui suivaient Jésus, dont Marie Madeleine qui fut témoin pour les apôtres eux-mêmes.

Et nous ? Nous ne sommes pas des « témoins oculaires » de la Résurrection, mais ne le sommes-nous pas du Ressuscité ? Ne pouvons-nous voir dans nos vies son œuvre et son Amour ? Et sommes-nous des « serviteurs de la Parole » ? Comment la faisons nous résonner, d’abord dans nos propres vies puis dans la vie de ceux qui nous entourent ? Pouvons-nous nommer des personnes qui ont reçu ou reçoivent la Parole, grâce à nous ? Sommes-nous capables de contempler ce qu’elle réalise dans leur vie ?

03 C’est pourquoi j’ai décidé, moi aussi, après avoir recueilli avec précision des informations concernant tout ce qui s’est passé depuis le début, d’écrire pour toi, excellent Théophile, un exposé suivi, 04 afin que tu te rendes bien compte de la solidité des enseignements que tu as entendus.

Après avoir parlé de ceux qui « ont entrepris de composer un récit », voici que l’auteur explique qu’il va faire aussi un « exposé suivi ». Comme eux, il compose mais plus qu’eux peut-être : il a fait un travail d’enquête pour avoir des informations précises et exhaustives (concernant tout ce qui s’est passé).
Notons qu’il le fait à l’adresse d’une personne. Ce Théophile est peut-être un personnage réel et peut-être un personnage fictif ou plutôt la personnification du groupe que vise Saint Luc. Notons alors qu’il s’agit d’un grec, comme l’atteste son nom, et non d’un juif, qu’il s’agit d’un croyant, le nom signifiant « aimant Dieu », et qu’il est qualifié d’excellent, ce qui signifie qu’il cherche vraiment à vivre de sa foi.
Enfin, nous avons le but de l’ouvrage : démontrer la solidité de l’enseignement reçu. Nous voyons donc qu’il s’agit d’une visée pastorale et non scientifique ou historique. Les remarques précédentes reviennent : rien n’est inventé ; c’est une enquête minutieuse qui a fait connaître des faits de manière indubitable puisque remontant aux témoins directs. Mais il est possible que l’ordre des événements et le choix de ceux qui sont repris soit dictés, non par la chronologie, mais par la démonstration. Il ne s’agit pas de tout savoir mais de démontrer que le Christ, mort et ressuscité, est bien le Messie accomplissant les promesses prophétiques et le Fils de Dieu qui nous sauve.

Et nous ? Que recherchons-nous dans la lecture de l’Evangile ? Sommes-nous prêts à croire que Dieu se serve ainsi de bonnes intentions typiquement humaines pour nous offrir sa Parole et nous parler encore aujourd’hui à travers ces mots pourtant anciens ?

En ce temps-là, 14 lorsque Jésus, dans la puissance de l’Esprit, revint en Galilée,

Jésus revient en Galilée car il vient de vivre au désert 40 jours, poussé par l’Esprit, avant d’être tenté par le diable. (Cf. Lc 4, 1-2)

Notons donc que c’est l’Esprit qui l’a emmené au désert et que c’est encore Lui qui le ramène à Nazareth. Cela nous montre que Jésus n’agit pas seul. Le projet de Dieu n’est pas seulement une décision du Fils de s’incarner et de faire ainsi connaître Dieu aux hommes… Ce n’est pas non plus le projet dictatorial d’un Père qui envoie son Fils, non seulement pour vivre, mais aussi pour mourir… Il s’agit d’une œuvre commune aux trois personnes, où coopèrent le Fils et l’Esprit dans l’accomplissement d’une mission donnée et confirmée par le Père. Le Père, Lui, y met toute sa joie (Cf Lc 3, 22) et tout son amour (Cf Mt 3, 17 ou Mc 1, 11). Bref, le Père qui est le Dieu d’Amour et qui met tout son Amour en Jésus) est totalement impliqué comme le Fils, comme l’Esprit.

Et nous ? Comment comprenons-nous la Révélation du Père et de l’Esprit en lien avec la Révélation du Fils ? Comment l’histoire de Jésus nous aide-t-elle à aimer le Père, à aimer l’Esprit ? Sommes-nous de ceux qui ne comprennent pas comment le Père a pu accepter et même demander le sacrifice du Fils ? Ne savons-nous pas que si le Fils seul souffre sur la croix et meurt, la communion intime des trois personnes en Dieu rende commune leur volonté et leurs actions, de sorte que si le Fils seul souffre, il ne souffre pas seul ? Comment ne pas envisager le point de vue du Père qui voit souffrir son Fils ? Puisque la souffrance du Fils est un mystère trop grand pour notre compréhension, acceptons au moins de reconnaître que c’est Dieu, Père, Fils et Esprit qui a choisi ce seul moyen de racheter l’humanité avec amour et avec justice. L’iniquité vient du péché des hommes, la justice vient du rachat par le sacrifice, l’Amour est de Dieu, qui se donne à nous.

sa renommée se répandit dans toute la région.

Le terme est important : il s’agit de renommée et non de foi. Les gens parlent des miracles et non de l’homme. Ils voient le spectaculaire, ils s’en tiennent à l’aspect matériel et corporel des choses. Pour l’instant, il y a de l’étonnement, peut-être de l’admiration mais pas encore de la foi !

Et nous ? Notre confiance en Dieu est-elle corporelle ou spirituelle ? Attendons-nous de Dieu qu’il soit un « distributeur automatique » de grâces ? Le prions-nous pour en obtenir du confort ou des biens matériels ? Ou bien est-ce par amour et dans la foi que nous venons à Lui ? Sommes-nous désintéressés (sans recherche de biens matériels) mais intéressés par Lui, sa personne, sa Parole et son message d’Amour ?

15 Il enseignait dans les synagogues, et tout le monde faisait son éloge.

Après la renommée, l’éloge : on reconnaît la valeur de son enseignement. Il est un maître. Ce n’est pas encore de la foi mais on s’en approche… On n’a pas encore foi en lui mais on reconnaît la vérité et la beauté de ses paroles. La vérité de ce qu’il est ne transparaît pas encore ou du moins n’est pas encore perçue pas ces foules mais les intelligences et les cœurs sont préparés à recevoir l’ultime révélation par la merveille de ses miracles et par la profondeur de son enseignement.

Et nous ? Sans doute avons-nous la foi, mais elle est si faible, si petite :
« Si vous aviez de la foi, gros comme une graine de moutarde, vous auriez dit à l’arbre que voici : “Déracine-toi et va te planter dans la mer”, et il vous aurait obéi. (Lc 17, 6)
Alors, comment nous préparons-nous à grandir dans la foi, a recevoir une foi plus vive et plus forte ?

16 Il vint à Nazareth, où il avait été élevé.

La précision « où il avait été élevé » pourrait paraître superflue puisque par deux fois déjà saint Luc l’a dit dans l’Evangile :
Lorsqu’ils eurent achevé tout ce que prescrivait la loi du Seigneur, ils retournèrent en Galilée, dans leur ville de Nazareth. (Lc 2, 39)
Et
Il descendit avec eux pour se rendre à Nazareth, et il leur était soumis. Sa mère gardait dans son cœur tous ces événements. (Lc 2, 51)
Mais en réalité la précision est plutôt là pour préparer à ce qui sera dit plus tard :
23 Mais il leur dit : « Sûrement vous allez me citer le dicton : “Médecin, guéris-toi toi-même”, et me dire : “Nous avons appris tout ce qui s’est passé à Capharnaüm ; fais donc de même ici dans ton lieu d’origine !” 
24 Puis il ajouta : « Amen, je vous le dis : aucun prophète ne trouve un accueil favorable dans son pays. (Lc 4, 23-24)
C’est donc bien pour un geste prophétique que Jésus revient à Nazareth, poussé par l’Esprit.

Et nous ? Tant de choses en apparence banales arrivent dans nos vies ; cherchons-nous à y découvrir le plan de Dieu dans nos vies ; sommes-nous à l’affut des merveilles de Dieu dans ce qui peut sembler le plus ordinaire ?

Selon son habitude, il entra dans la synagogue le jour du sabbat,

La synagogue est bien sûr le bâtiment où se rassemble la communauté juive pour la prière, mais elle est aussi, et même peut-être avant tout, l’assemblée elle-même. C’est un peu comme ce que nous désignons par église (bâtiment) ou Eglise (communauté). Ainsi, l’évangéliste désigne un lieu mais surtout, il nous montre que Jésus s’insère dans la communauté locale. L’expression « selon son habitude » signifie sans doute que depuis son baptême et le début de sa vie publique, Jésus a pris cette habitude partout où il passe, mais peut-être aussi plus simplement que depuis bien longtemps, il faisait cela dans sa synagogue, le lieu où il a grandi.

Et nous ? Faisons-nous vraiment partie d’une communauté, quelle y est notre place ? Notre service ? Connaissons-nous les membres de cette communauté ? Cherchons-nous à les rencontrer, toujours plus, et mieux ?
Notre communauté est-elle pour nous un lieu vraiment fraternel où nous allons à la rencontre des autres ou un simple lieu de passage où nous croisons d’autres passants ?

et il se leva pour faire la lecture.

Jésus, Verbe de Dieu et Parole Vivante du Père, lit le texte de la Parole de Dieu…
Alors ? Voyons-nous ainsi le mystère de l’Incarnation où l’homme- Dieu se soumet ainsi aux moyens humains ? Il est l’auteur, Il est le sens et la raison d’être de ce texte mais il s’en fait le serviteur en le lisant et le proclamant. Ainsi, de tous les moyens que Dieu nous donne pour aller vers Lui, il est Dieu mais il prie… Il est Maitre et Seigneur mais se fait serviteur (cf Jn 13, 13-14)…

17 On lui remit le livre du prophète Isaïe.

Ce n’est sans doute pas un hasard : c’est certainement providentiel qu’on remette à Jésus ce livre. Isaïe est en effet surnommé par les pères de l’Eglise le « cinquième évangile », tant ses prophéties sont directement en lien avec l’Evangile de Jésus. Il y a bien sûr les chants du serviteur, qui nous avertissent d’un Messie souffrant et sacrifié pour son peuple mais c’est tout le livre qui nous éclaire. Ainsi par exemple, à propose de l’origine de Jésus :
Le Seigneur lui-même vous donnera un signe : Voici que la vierge est enceinte, elle enfantera un fils, qu’elle appellera Emmanuel (c’est-à-dire : Dieu-avec-nous). (Is 7, 14)

Et nous ? Puisque nous savons que le premier Testament annonce le Nouveau et que le Nouveau Testament accomplit le premier, comment cherchons-nous à mieux entrer et connaître ce Premier Testament, qui nous donne tant de clefs et d’occasions pour comprendre le Nouveau Testament et le message du Christ ?

Il ouvrit le livre et trouva le passage où il est écrit :

Si c’est la providence qui lui fournit le livre d’Isaïe, c’est Jésus qui choisit le passage et donc la prophétie qu’Il va lire. L’évènement est donc dans la puissance de l’Esprit, par un fait de la providence du Père et d’un choix du Fils. L’œuvre de Salut est toute entière trinitaire.

Alors ? Saurons-nous nous laisser guider et enseigner par la Sainte Trinité ? Saurons-nous et cherchons-nous à la découvrir à l’œuvre dans chaque page de l’Evangile ?

18 L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction.

Voici la citation exacte de ce passage du prophète Isaïe :
01 L’esprit du Seigneur Dieu est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé annoncer la bonne nouvelle aux humbles, guérir ceux qui ont le cœur brisé, proclamer aux captifs leur délivrance, aux prisonniers leur libération,
02 proclamer une année de bienfaits accordée par le Seigneur, (Is 61, 1-2)
En gras, nous trouvons un passage qui n’est pas dans la citation faite par Jésus : soit que le livre de cette synagogue n’ait pas été complet ; soit que la relation de cet épisode ait été faite par un saint Luc, qui n’avait pas sous les yeux le texte original. En revanche, Jésus ajoute « aux aveugles qu’ils retrouveront la vue », ce qui est annoncé au moins trois fois dans le livre d’Isaïe, avec par exemple :
Tu ouvriras les yeux des aveugles, tu feras sortir les captifs de leur prison, et, de leur cachot, ceux qui habitent les ténèbres. (Is 42, 7)
Comme on retrouve aussi dans cette citation les captifs libérés, on comprend que ces citations soient facilement rapprochées l’une de l’autre, ce que fait sans doute l’évangéliste et non Jésus qui lisait l’une ou l’autre (sans doute Is 61).
La prophétie en tout cas, par cette première phrase, s’applique parfaitement à ce que St Luc a raconté du baptême de Jésus, quelques versets plus tôt :
21 Comme tout le peuple se faisait baptiser et qu’après avoir été baptisé lui aussi, Jésus priait, le ciel s’ouvrit.
22 L’Esprit Saint, sous une apparence corporelle, comme une colombe, descendit sur Jésus (Lc 3, 21-22)
Ainsi l’Esprit est sur Lui ; quant à l’onction, le Christ la reçoit dès sa conception puisque l’ange avait annoncé à Marie :
32 Il sera grand, il sera appelé Fils du Très-Haut ; le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père (Lc 1, 32)
Or le Roi, c’est aussi le Messie, l’oint de Dieu. Tout cela ne se fait évidemment pas sans l’Esprit comme l’explique encore l’ange Gabriel :
« L’Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre ; c’est pourquoi celui qui va naître sera saint, il sera appelé Fils de Dieu. (Lc 1, 35)
Jésus commence par une citation qui reprend un des signes qu’Il a déjà donnés. Sans doute, peu de gens de Nazareth ont assisté à cette scène du baptême, mais comme il a été dit plus haut, la renommée précédait Jésus, le récit des signes qu’Il a vécus l’a donc sans aucun doute précédé. Mais ce qu’il fait comprendre, c’est que maintenant, il n’est plus seulement question de signes mais de réalité : Il est l’oint.

Et nous ? Sommes-nous prêts à passer du symbole à la réalité ? Croyons-nous vraiment à toutes les réalités de foi ou bien les considérons-nous seulement comme des façons de parler ou des mythes pour faire comprendre et non pour dire la réalité ?
Les sondages (toujours sujets à caution bien sûr) semblent indiquer par exemple que nombre de catholiques ne croient pas en la présence réelle, sacramentelle et substantielle du Christ dans l’Eucharistie, comme si le pain n’était qu’un symbole, un rappel du dernier repas et de l’Amour de Jésus qui partage avec ses disciples… Ceux qui en restent là ne sont pas encore entrés dans la foi eucharistique, dans la foi catholique !
De même que les témoins du baptême pouvaient penser que cette colombe n’était que symbole et que l’Esprit restait au ciel, de même certains pensent que le pain n’est qu’un symbole et que le Christ reste auprès du Père. Mais le discours de Nazareth montre que le symbole est dépassé et que la réalité est que le Christ est l’oint. De la même manière, la célébration de la messe dépasse le simple symbole pour transformer réellement le pain en Corps du Christ. Les aspects matériels (forme, couleur, goût et même composition chimique) restent les mêmes, mais la substance (ce qui est la chose en réalité) n’est plus du pain mais le Corps de Jésus.

Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs leur libération, et aux aveugles qu’ils retrouveront la vue, remettre en liberté les opprimés, 19 annoncer une année favorable accordée par le Seigneur.

Si par de nombreux miracles Jésus a exécuté concrètement et matériellement ce programme, il faut pourtant le comprendre essentiellement au plan spirituel. Ainsi par exemple, la Bonne Nouvelle est annoncée à tous et pas seulement à ceux qui sont matériellement pauvres. Il est donc question de pauvreté spirituelle, ce qui est le cas de tous les hommes depuis le péché originel. De la même façon, la « liberté » des « opprimés » est forcément spirituelle, sinon elle serait la même chose que la libération des captifs. Et justement, on ne voit pas Jésus faire sortir des coupables de prison, il s’agit donc encore de captivité spirituelle : péchés, addictions… Ajoutons que ce ne sont pas tous les aveugles qui ont été guéris par Jésus…
A moins qu’on ne parle de l’aveuglement spirituel qui fait choisir le péché plutôt que Dieu et le Salut car alors, Jésus est mort pour tous !

Et nous ? Sommes-nous conscients de nos pauvretés et de nos handicaps spirituels ? Sommes-nous à la fois désireux d’en être libérés et confiants dans le Christ qui sauve ? Que faisons-nous pour nous montrer dignes de telles grâces ?

20 Jésus referma le livre, le rendit au servant et s’assit.

Jésus aurait pu aller beaucoup plus loin dans la lecture, tout le chapitre 61 est un chapitre annonçant le Salut et un renouvellement d’alliance entre Dieu et son peuple, voici quelques extraits :
03 ceux qui sont en deuil dans Sion, mettre le diadème sur leur tête au lieu de la cendre, l’huile de joie au lieu du deuil, un habit de fête au lieu d’un esprit abattu. (Is 61, 3)
Et :
06 Vous serez appelés « Prêtres du Seigneur » ; on vous dira « Servants de notre Dieu. » (Is 61, 6)
Et même :
11 Comme la terre fait éclore son germe, et le jardin, germer ses semences, le Seigneur Dieu fera germer la justice et la louange devant toutes les nations. (Is 61, 11)
Mais il s’arrête et referme le livre car désormais ce n’est plus le livre mais la Parole ; ce n’est plus la prophétie mais l’accomplissement.

Alors ? Comprenons-nous maintenant le rapport entre le Premier et le Nouveau Testament ? Il y a en même temps une page qui se tourne et un lien direct et manifeste entre ce qui vient d’être dit et ce qui se vit dans cette synagogue.

Tous, dans la synagogue, avaient les yeux fixés sur lui.

Bien que le texte que nous étudions soit composé de deux parties bien séparées par 4 chapitres, voici qui fait le lien avec le début. La première partie nous rappelle que l’Evangile est composé à partir de faits qui ont été racontés par des témoins oculaires. Ces témoins sont des « serviteurs de la Parole. Voici que nous voyons maintenant les témoins fixer leur regard sur le Christ (témoins oculaires) curieux et même avides de sa Parole (mais pas encore serviteurs de celle-ci).

Et nous ? A quel moment fixons-nous nos regards sur le Christ ? Sommes-nous des adorateurs ? C’est ce que demande le Christ lui-même à la Samaritaine :
L’heure vient – et c’est maintenant – où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et vérité : tels sont les adorateurs que recherche le Père. (Jn 4, 2 »)
Sommes-nous curieux et avides de la Parole ? Comment la fréquentons-nous, la recevons-nous, la méditons-nous, l’assimilons-nous ?

21 Alors il se mit à leur dire : « Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Écriture que vous venez d’entendre. »

La providence du Père, le travail de l’Esprit et le choix du Christ converge dans cette affirmation. C’est Lui le Christ qui accomplit, parce qu’il est l’oint, consacré par l’Esprit mais envoyé par le Père qui prépare ce moment de toute éternité.
Pour nous, au début de la vie publique du Christ, il y a donc :

  • Le baptême qui nous révèle qui est le Christ : l’Oint, le Messie le Fils de Dieu.

(Les généalogies établissent la réalité de son incarnation en rappelant aussi son origine divine)

  • Les tentations qui nous apprennent ce que fait le Christ : Il est vainqueur du démon et le chasse de ce monde par la puissance de la Parole
  • Le passage à Nazareth qui donne un sens à la mission avec la présence du Christ dans le monde : accomplir les promesses et restaurer l’Amour de Dieu et la vie de la grâce en nous.

Ainsi la fin du chapitre 3 et le début du chapitre 4 nous donnent comme un sommaire, une annonce en résumé de tout ce qui va arriver par la suite.

Alors ? Laissons-nous emporter par ces annonces et lisons, découvrons ou redécouvrons, cherchons, creusons, méditons, approfondissons cette Parole et sans nous lasser, recommençons à aller puiser à cette source inépuisable de l’Amour de Dieu.

En guise de conclusion :
C’est donc tout le projet et la grandeur de la Parole de Dieu dans l’œuvre de Luc qui nous sont proposés ce dimanche. Il s’agit pour nous d’en découvrir la double origine : humaine et divine. Il s’agit pour nous d’y trouver un fondement solide pour notre connaissance et pour notre foi. Il s’agit de découvrir la lettre et de nous retourner vers la Parole. Il s’agit de passer des yeux qui lisent, des oreilles qui écoutent au cœur qui reçoit, qui accueille et qui croit.
C’est une Bonne Nouvelle qui est annoncée ; c’est l’Amour de Dieu à l’œuvre dans notre monde et dans notre histoire qui nous est révélé ; c’est notre capacité à coopérer et à profiter de ses grâces qui nous est rappelée et offerte.
C’est aussi le mystère de la Sainte Trinité et du Christ, Fils de Dieu incarné qui est étalé devant nos yeux, non pour que nous comprenions ce qui reste un mystère, mais pour que nous nous émerveillions d’une vérité qui nous éblouit et qui donne un sens à notre vie.

 
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